Les chantiers
de Filigranes

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(c) Photo : Anne-Marie Suire

 


 

 "Le monde de l'imprimé est un monde privé. Les comportements y sont policés, convenus. On n'y entre pas sans frapper aux portes et sans montrer patte blanche."
La lourdeur économique de l'entreprise institue une sélection par la rentabilité et rend périlleuse, donc rarissime, l'aventure de la découverte.
Le virtuel, lui, a germé à toute allure en plein vent dans l'ignorance absolue des codes  contraignants qui parviennent encore à régir notre société.
C'est un monde dans lequel, justifié par une transparence qui est l'apanage de la démocratie, le domaine public envahit et tente de balayer l'intime des rapports humains.
Le mur va jusqu'à oublier l'affiche pour devenir lui-même le  support.

Nos murs domestiques, les écrans de nos ordinateurs, d'accès facile, infiniment multiples, variables et passagers échappent au définitif, à l'irrémédiable.

Et, partant, à l'obligation de perfection qui est le passeport de nos bibliothèques. Ils facilitent l'audace d'une expression directement issue de l'émotion.            

Les portes de ce domaine sont constamment ouvertes, on peut y pénétrer sans  invitation.

Lieux privilégiés de l'apprentissage et du partage ces ardoises magiques nous acceptent "tous capables". Elles transforment enfin le sélectif en collectif."

Francis Finidori
 

 

 
   

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Allumer son ordi (une minute en moyenne, mot de passe compris). Les icônes s'affichent, les dossiers s'ouvrent. Où est-il ? Sur le bureau bien sûr, oui mais où dans ce fatras de fichiers ? Trois photos du petit dernier. Un bout de film récupéré sur You Tube. Le mode d'emploi du vélo d'intérieur. La thèse de X. La pétition à tirer sur papier et à faire circuler. Le supplément littéraire du Monde d'hier en PDF. Un début d'article pour C, en déshérence. Le dossier "Éditos de Fili", surligné en jaune. Où est-il ce poème reçu hier que je veux lire, que j'ai mis de côté car justement j'y tiens. Je veux le savourer. Je m'interroge sur la lecture de poésie sur écran. Je veux me mettre à l'épreuve. Suis-je prêt ? Je le trouve enfin, je lance le traitement de texte. La page s'affiche soudain. Irruption brutale de mots. Une impression visuelle immédiate. Une présentation que j'aime ou non. Une police. Ce n'est pas celle que j'aurais choisie. Commencer par le début. Souris ! (5 minutes).

De ces deux sites que je fréquente assez régulièrement (Poézibao et remue.net), je retire une impression de grand foisonnement, de variété et de liberté. Chaque clic est une clé. Écriture plurielle, multiple, plurale me souffle mon dictionnaire. Lecture aléatoire, possible, incertaine. Ne pas céder au zapping. Prendre le temps. Je dois me morigéner. Je m'engage. Je tiens bon. Sans Internet, je n'aurais jamais eu accès à ce texte. Sans Internet, j'en aurais ignoré jusqu'à l'existence. Sans Internet je n'aurais peut-être pas acheté le recueil. Sans Internet, j'aurais pensé, à tort bien entendu, qu'il vaut mieux lire Jaccottet, Perse, Rilke, Celan, poésie Gallimard. Je lis Dupont, Durand, Martin, Martinet, Marteau, Merleau pas Ponti.

Ce sont hommes et femmes du commun à l'ouvrage. Ce sont nos pairs. Ils cherchent comme nous à donner forme à l'expérience, à la vie. Ils bricolent des formes. Ils peaufinent. Ils coupent. Ils collent. Ils ravaudent. Ils sont des milliers. Ils ont été retenus, choisis et mis en ligne par d'autres qui plaident pour une littérature d'accès libre, des recherches qui se donnent à voir, autant d'antichambres de livres à venir dont quelques-uns seulement verront le jour sous la forme d'un recueil édité de manière subtile, artisanale, confidentielle chez un éditeur de la France profonde, celle qu'on découvre quand on quitte enfin les autoroutes.

Paradoxes, nostalgie, une pointe de regret. J'aurais aimé sentir sous le doigt le grain du papier. J'aurais voulu prendre le recueil dans mon sac et me serais installé sur la terrasse, le fauteuil, le lit. J'aurais voulu sentir le poids, évaluer le nombre de pages, feuilleter dans tous les sens."

Michel Neumayer

 
 
 

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