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Edito
"La
création du Monde étant la création par excellence, la cosmogonie devient le
modèle exemplaire pour toute espèce de création "
Mircea Eliade "Aspects du mythe"
Ecrire, penser l'ordre du
monde en usant de la langue. Y fonder sa propre langue au sein de la langue.
Aux origines, cette absence, chaos fait de violence indicible, de tensions,
d'énergies. En ces temps, les Mots attendaient infiniment d'être Verbe pour
éclairer l'inexplicable de la pensée.
Pour tenter de cerner l'ombre mythique des premières fois, on écrit et chaque
fois le réel renaît sous le travail des mots. Recherche inscrite à jamais au
coeur des hommes. Obstiné devoir d'humanitude. Ecriture toujours recommencée des
commencements pour que s'engendrent une suite, un devenir, une possible fin.
Ligne de démarcation entre ordre et désordre, entre visible et invisible,
advient le texte, surgit le sens, s'énonce un savoir toujours plus complexe sur
soi, sur le monde.
Avant le temps de
l'oubli... Surtr, gardien du pays brûlant de Muspell demanda à Voluspa de lui
ouvrir son jardin, à lui, Surtr, car il sait que fertile est la fraîcheur.
Il connaît le drame de la nature, quand, desséchée, l'herbe s'embrase, la terre
cuivrée se couvre de vapeurs de cendres et le ciel rougeoie.
O Voluspa, prie-t-il, ouvre pour moi tes jambes vertes. J'espère l'eau vivace de
tes printemps, moi qui sans trêve habite le désert jusqu'au vertige.
O Voluspa, verse sur mes douloureuses vertèbres l'eau de vie et ma mémoire ne
croisera plus le chemin des dragons morts.
Mais Voluspa qui connaissait les destinées répondit : "Les hommes virils
arrivent toujours avec la pluie et j'ai souvenance qu'un géant violent appelé
Surtr a autrefois battu la nuit à mort. Jamais je n'ouvrirai mon jardin à ce
brutal !"
A ces mots, le géant déchaîna sa colère, envoya le feu et la foudre contre les
arbres du jardin enchanté. Le poids des choses devint brûlant. La faim et la
soif naquirent spontanément de l'immensité. Quelques étoiles se morcelèrent...
Mais Voluspa tint bon !
Ecrire, penser l'ordre du
monde en usant de la langue.
Et si l'acte fondateur, follement démiurgique, de celui qui écrit était d'oser
participer au chaos initial - les écrits des autres - en y ajoutant son propre
texte ?
Passer d'une parole autre à une parole mienne : de l'autre de l'autre à l'autre
de moi. Plurivocité de la mémoire des temps, pour que toujours renaisse la
langue dans l'activité créatrice des commencements.
Odette
Neumayer
14 mars 1990
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FILIGRANES (filigran) n.m. (1673) du lat.
"filigrana" fil à grain).Ouvrage fait de fils de métal (argent ou
or),de fils de verre,entrelacés et soudés. Dessin qui apparaît en
transparence dans certains papiers.
(Fig.) Lire en filigrane, entre les lignes, deviner ce qui n'est pas
explicitement dit dans le texte.
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